Le 26 mars 2015, le village de Yenn Todd (Sénégal) a accueilli un atelier organisé par le Projet AWA (BMBF – IRD) pour la restitution des résultats de l’enquête conduite en 2014 auprès des communautés, constitué de 7 villages littorales, de pêcheurs de Yenn sur l’impact de l’implantation des récifs artificiels dans la zone de pêche protégée. L’atelier s’est tenu en présence des représentants de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), du Centre de Recherche de Dakar Thiaroye (ISRA/CRODT), de la Commission Sous Régionale des Pêches (CSRP), de la Direction des Aires Marines Communautaires de Protégées (DAMCP), des Comités locaux de pêcheurs, des notables des 7 villages de Yenn, ainsi que des pêcheurs de la communauté de Yenn et de leurs familles, notamment les enfants du village.

Après les allocutions de bienvenue et la projection du film « AWA – Du poisson pour demain… » (Production IRD/IFREMER/CSRP), les chercheurs de l’IRD, Dr Timothée Brochier, et du CRODT, Dr. Massal Fall, ont rappelé le contexte de l’enquête avant de procéder à la présentation des résultats, et une visite de l’exposition de poster sur bâches.

 

Contexte de l’enquête

En 2014, dans le cadre du projet AWA, l’IRD et le CRODT, en collaboration avec les Ministères sénégalais en charge de l’Environnement et de la Pêche, avaient procédé au recueil de la parole des pêcheurs du terroir de Yenn sur l’impact de l’implantation des récifs artificiels dans la zone de pêche protégée depuis 2004.

Yenn Todd a été choisie comme zone d’étude, en raison des conclusions retenues de l’expérience du récif artificiel mis en place par la JICA en 2002 à Bargny. Suite à l’arrêt de ce projet, la surveillance n’était plus exercée dans ce récif, occasionnant ainsi une surexploitation des ressources. Cette expérience a permis de retenir qu’il existe chez les pêcheurs une forte dépendance aux projets extérieurs et à leur PTF. C’est ainsi que la JICA a créé en 2004 un récif artificiel à Yenn, sur le principe de la co-gestion. L’étude scientifique menée dix années plus tard en 2014, basée sur une approche mathématique et combinée à une enquête auprès des pêcheurs, visait à évaluer l’importance du récif artificiel : la perception par les pêcheurs de son impact sur les poissons, et de son intérêt comme outil de gestion des ressources marines vivantes.

L’objectif de cette étude était double : faire en sorte que l’ensemble des acteurs puissent se saisir de cet enjeu majeur pour l’avenir et que des solutions construites collectivement émergent par la concertation. La question principale a été de savoir si l’activité de pêche dans le récif artificiel et ses environs immédiats devrait être interdite/limitée (contrôlée), ou au contraire en accès libre.

 

Restitution des résultats

Les conclusions de l’approche mathématique ainsi que celle de l’enquête relative à la perception des pêcheurs expérimentés se recoupent. Les résultats de l’approche mathématique sontde plus confortés par huit autres recherches publiées de par le monde, dont surtout des approches de terrain.

L’étude théorique montre que dans le cas général, le déploiement de récif artificiel peut avoir une bonne comme une mauvaise influence sur le milieu concerné, selon le mode de gestion adopté. En effet, un récif artificiel ouvert à la pêche fonctionne comme un piège à poissons et favorise la surexploitation, car aucun système de contrôle n’est exercé. Par contre, un récif artificiel protégé fonctionne comme une nourricerie de poissons, favorisant leur multiplication et permettant une gestion raisonnable de la ressource, qui croit et se développe dans de bonnes conditions.

L’étude conduite auprès de pêcheurs expérimentés de la zone a donné des résultats significatifs sur la perception et l’utilité des récifs artificiels, au sein d’une zone de pêche protégée.Les pêcheurs sont partagés sur la question de l’utilité que représente le récif pour eux selon qu’il soit ouvert ou fermé à la pêche :

  • 80% des pêcheurs interrogés considèrent que la pêche dans le récif artificiel de Yenn est en libre accès (dans le même temps, les responsable du comité local de pêche (CLP) affirment que le récif est surveillé) ;
  • Les ¾ des pêcheurs interrogés considèrent qu’un récif artificiel en libre accès n’a pas d’utilité ;
  • Chez les plus de 45 ans, la quasi-totalité des pêcheurs interrogés pensent qu’un récif artificiel en accès limité favoriserait la productivité et le rendement de leur activité ;
  • Seule la ½ des pêcheurs de moins de 45 ans comprennent l’utilité de protéger les récifs artificiels.

Recommandations

L’analyse approfondie des résultats montre que les pêcheurs qui plaident pour une fermeture de la pêche sur les récifs artificiels ont une connaissance empirique de la dynamique des populations de poissons. Les chercheurs recommandent aux pêcheurs de discuter des résultats présentés au sein de leur communauté, et encouragent les plus jeunes à discuter avec les plus âgés et les plus expérimentés.

Les chercheurs recommandent également à la communauté des pêcheurs de Yenn de ne pas implanter d’autres récifs tant qu’une solution de co-gestion (système de surveillance partagée) n’aura pas été trouvée et appliquée.

Suite à cette restitution, un représentant du CLP a pris la parole pour dire que le CLP s’engage, à surveiller non seulement le récif artificiel existant mais aussi celui qu’ils sont en train d’immerger avec l’appuis de financement extérieur.

Pour plus d’information : http://dx.doi.org/10.1016/j.ecolmodel.2014.10.034

Jeudi 26 mars 2015
Français

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